Vaccin obligatoire, mort sociale et liberté

par Régis DESMARAIS
mercredi 25 novembre 2020

 

Le président vient de déclarer que la vaccination contre la Covid-19 ne serait pas obligatoire. Cette position est rassurante, mais demain ? Sera-t-elle toujours à l’ordre du jour ? L’obligation vaccinale doit être étudiée pour en cerner les avantages mais aussi les indéniables dangers.

Faut-il ou non se faire vacciner ? La vaccination doit-elle être obligatoire ? Ces deux questions taraudent les individus depuis que l’inoculation et les vaccins ont été inventés. Les débats d’hier ressemblent à s’y méprendre à ceux d’aujourd’hui. Si l’obligation vaccinale a été instaurée dans certains cas, à partir du XIXème siècle, les expérimentations nazies puis les scandales des médicaments et vaccins pathogènes ont depuis modifié les termes d’un débat plus que centenaire.

La crise du coronavirus semble désormais s’acheminer vers une crise politique et sociale avec pour axe de discorde la vaccination obligatoire. De plus en plus de politiques, de journalistes, de médecins et d’intervenants divers mais médiatiques se prononcent pour une obligation vaccinale dont le refus serait sanctionné par une mort sociale. Les discours sur l’obligation vaccinale ne s’embarrassent pas d’égards pour ceux qui refusent le vaccin et encore moins pour leur arguments superbement ignorés. Certains individus prônent même l’obligation vaccinale avec des mots et des propositions qui n’auraient pas dépareillé dans les parcs longeant l’Allier en 1941.

L’obligation vaccinale et son refus : des arguments indémodables.

La lecture des archives de la presse est riche d’enseignement, et somme toute, fort utile dès lors que les termes des débats semblent bien similaires à ceux d’aujourd’hui.

Dans L’évènement du 10 mars 1875, la question de la durée de l’immunité conférée par la vaccination est abordée puis celle de l’obligation vaccinale. L’Académie de médecine, saisie de la question, doit se prononcer et les débats sont agités. Les partisans de cette obligation justifient leur position au motif que : « La liberté individuelle est chose assurément fort respectable, mais quand il s’agit de l’intérêt des masses, elle doit s’effacer. » Certes, les dangers de la vaccination ne sont pas ignorés : « … on a voulu arguer des dangers que pouvait entraîner l’inoculation vaccinale pour en combattre la pratique ; mais ces dangers, qui sont réels, nous le reconnaissons, sont mille et mille fois moindre que ceux auxquels expose la variole. »

Il est opportun de signaler que le débat sur l’obligation vaccinale et sa justification par une diminution des libertés concernaient … la variole : à savoir une maladie dont le taux de mortalité est d'environ 30 % chez les personnes non vaccinées et de 3 % chez les personnes vaccinées. A titre de rappel, le taux de mortalité de la Covid-19 est estimé à 0,5% (nombre de personnes qui décèdent divisé par nombre de personnes diagnostiquées et prises en charge médicalement, case fatality rate). On le voit, la question de la vaccination obligatoire concernait, à l’époque, une maladie effroyablement plus dangereuse que la covid-19.

Dans son édition du 12 avril 1881, L’ordre de Paris, sous la plume d’Edmond Barré, abordait la question de la vaccination et de la revaccination obligatoires. Il est fait référence une nouvelle fois à l’Académie de médecine et à sa séance houleuse. Cette séance est présentée comme le théâtre de discussions orageuses. Il est vrai, un « honorable député a pensé que le seul moyen d’obliger tout le monde à se faire revacciner était de les y contraindre par la loi. » Le journaliste, avec humour, y décrit la mise en œuvre possible de cette vaccination obligatoire : « cérémonie au Champ de Mars ou à Longchamps, le chef de l’Etat, les présidents des chambres, les députés et sénateurs venant publiquement et les bras nus, se faire revacciner devant les troupes assemblées : noble exemple ! » Toutefois le journaliste objecte que si tous les Français y passaient, puisque « vous prétendez que la société a le devoir d’imposer aux récalcitrants le respect de la santé des autres », quid des étrangers ? « Si les Anglais, les Russes, les Américains, les Danois etc… refusent la vaccine obligatoire, comment ferez-vous pour les empêcher de nous apporter le virus contagieux ! ». Et de lancer : « Les forcera-t-on d’exhiber leurs biceps à la frontière de la même façon qu’ils nous montrent leur passeport et le contenu de leurs malles. » Le journaliste affirme que « loin de faire violence au malade, nous pensons, au contraire, que la persuasion est le meilleur des procédés que l’on puisse employer pour atteindre le but que l’on se propose. » Pour l’auteur de cet article, l’obligation vaccinale fondée sur la coercition serait « un procédé barbare, pour certains hommes, une réminiscence des tortures du moyen-âge, et nous n’exagérons pas en parlant de la sorte. » et de conclure « Puisqu’il faut mourir de toute façon et que l’on n’a pas encore trouvé de moyen de nous préserver de cette fatale issue, laissez nous mourir en paix ; mais, pour Dieu, ne nous tourmentez plus avec vos microbes et rengainez vos lancettes. »

Le Petit Marseillais du 14 avril 1881 faisait quant à lui, le point sur la vaccination obligatoire dans les cinq parties du monde. On y apprend que l’appréciation des gouvernements est différente et variée en cette matière. Les uns partisans de la vaccination infligent des amendes et même de la prison à ceux qui refusent cette mesure, d’autres n’imposent l’inoculation prophylactique qu’à une certaine catégorie de citoyens. Enfin, il est des pays où la pratique de la vaccination est laissée complètement libre. Le Petit Marseillais nous dressait un état du monde suivant :

Pays où la vaccination est obligatoire pour tout le monde sous peine d’amende et de prison (entre parenthèse date de cette obligation) : Allemagne (1874), Angleterre (1867), Bavière (1807), Ecosse (1864), Grèce (1870) Irlande (1868) Roumanie (1854), Suisse (1816), Turquie (1850), Wurtemberg (1818).

Pays où la vaccination n’est pas obligatoire : Autriche, Espagne, Hollande, Etats-Unis d’Amérique, Asie, Afrique, Océanie, Amérique.

Pays où la vaccination n’est appliquée que sur certaines classes de citoyens : Belgique, France, Italie.

Dans son édition du 29 juillet 1883, Le journal des villes et des campagnes faisait lui aussi le point sur l’obligation vaccinale. A cette occasion, il rappelait que deux ans auparavant l’Académie de médecine s’était penchée sur cette question controversée. L’Académie de médecine avait dû mettre en balance deux arguments forts, tenus pour l’un, par le camp favorable à l’obligation vaccinale, et pour l’autre, par ceux qui refusaient cette obligation. Ces arguments n’ont pas pris une ride. Le camp favorable à la vaccination soutenait « qu’il fallait pourvoir par l’obligation à un grave intérêt public et que cette considération dominait toutes les autres. » Le camp opposé soutenait que « des raisons d’ordre supérieur, basées sur le respect que commande la liberté [s’exercent] sur quelque chose de très intime et devant être écoutée. » Une loi imposant la vaccination était présentée comme une loi qui ne s’appliquerait « qu’au prix de mesures vexatoires et inquisitoriales qui la rendrait odieuse, et par suite impuissante. » L’Académie de médecine avait, dans sa majorité, tranché en faveur du principe de la non-obligation. Toutefois, pointait déjà l’argument selon lequel « Il faut (…) n’ouvrir les portes des écoles et des carrières qu’à ceux qui, s’étant fait vacciner, ne feront pas volontairement peser une menace sur leurs voisins. »

En 1891, l’Académie de médecine formulera enfin le vœu de l’obligation vaccinale.

La loi sur l’hygiène et sur la santé publique du 15 février 1902 a rendu obligatoire la vaccination contre la variole. Le 10 décembre 1913, L’éclair fait le constat que cette loi n’est pas appliquée comme il convient et qu’elle l’est de moins en moins.

Il y a cent ans, les mêmes arguments opposaient les tenants et les partisans de la vaccination obligatoire. Toutefois, une chose fondamentale nous sépare de nos prédécesseurs : tous ces débats concernaient une vaccination pour une maladie autrement plus dangereuse que la Covid-19. Comme le rappelait un intervenant de l’époque, « Va-t-on vacciner de la tête aux pieds chaque individu pour le protéger de toutes les maladies ? » La question du curseur à fixer est essentielle : jusqu’où peut-on limiter la liberté individuelle, à partir de quand l’intérêt général justifie-t-il cette limitation ? Pour quelle maladie doit-on entrer dans une logique de coercition ? Quel sens a une obligation vaccinale si cette obligation ne concerne qu’un territoire ? Et surtout, quel est le degré de fiabilité du vaccin et sa sûreté pour inciter, voire forcer, les citoyens à se faire vacciner ?

Les arguments des uns et des autres sont légitimes. Toutefois, ils ne peuvent être résolus dans la précipitation et l’urgence. Il est remarquable de voir que les débats furent longs et nombreux avant la loi de 1902.

La vaccination contre la Covid-19

Il n’aura échappé à personne que tout le monde parle de la vaccination et le plus souvent de la vaccination obligatoire. Certains médecins de plateaux télé annoncent qu’ils se feront vacciner dès le vaccin proposé, des journalistes évoquent la nécessité de l’obligation vaccinale et le président de la République semblait lier, dans sa précédente allocution télévisée, le retour à une vie normale à la vaccination. Certes, dans son intervention du 24 novembre 2020, Emmanuel Macron a décidé que la vaccination contre la Covid-19 ne serait pas obligatoire. Toutefois, cet engagement ne repose que sur les évolutions observables de la Covid-19 au jour de l’intervention présidentielle. Comme toute la politique sanitaire du gouvernement évolue au fil des fluctuations des taux d’occupation des lits en réanimation, du nombre de contaminations révélées par des tests critiquables et du nombre de décès, rien ne nous donne l’assurance que la position du président ne changera pas comme il en fut pour les masques. Dans tous les cas, Emmanuel Macron propose déjà de vacciner en décembre les personnes âgées avec un vaccin encore globalement inconnu !

Tous ces propos, pour une maladie dont le taux de mortalité est inférieur à 0,5%, laissent rêveur. Comment des médecins, au mépris des principes de précaution élémentaire, peuvent-ils claironner qu’ils se feront vacciner tout de suite alors que le vaccin n’est pas sérieusement documenté, y compris dans ses effets secondaires ? Comment un chef d’Etat peut-il lier le retour à une situation normale à la vaccination alors que l’anormalité de la situation découle en grande partie de mesures inappropriées adoptées face à une maladie fort peu mortelle ? Récemment une étude a montré que le confinement et le couvre-feu n’ont pas eu d’effets avérés sur la mortalité. La Suède, qui n’a pas confiné, présente un taux de mortalité par million d’habitants inférieur à celui de la France (638 contre 750 pour la France). Les voisins de la Suède, Danemark, Norvège ou Islande qui ont pratiqué un confinement très allégé sans quasiment de restrictions ont un nombre de morts par million d’habitant très inférieur à la moyenne mondiale (186 morts/million d’habitants). Le sentiment d’une démarche volontariste visant à promouvoir le vaccin, quelle que soit sa réelle utilité, ne peut que se répandre dans la population.

L’OMS est pourtant claire. Elle évoque la vaccination si des vaccins sûrs et efficaces contre la COVID-19 sont mis au point. Mieux, l’OMS estime que toutes les personnes pour lesquelles ils pourraient être bénéfiques, où qu’elles se trouvent, et d’abord celles pour qui les risques sont les plus grands, devraient y avoir accès le plus rapidement possible. L’OMS semble donc rattacher la pratique vaccinale à ceux pour lesquels il pourrait être bénéfique, à savoir les personnes âgées et celles atteintes de comorbidités. Dés lors, vacciner des adolescents et des adultes en bonne santé est sans intérêt et presque une idée folle.

Or pour que la liberté individuelle s’efface quand l’intérêt des masses, donc l’intérêt général, le commande, il faut que la maladie susceptible de porter atteinte au plus grand nombre soit dangereusement mortelle (ce n’est pas le cas de la Covid-19) et que le vaccin soit sûr dans la qualité de sa composition, de ses effets, de leur durée et au regard de l’absence d’effets secondaires plus dangereux que la maladie que l’on souhaite éradiquer. La méfiance vis-à-vis des vaccins n’est pas une lubie de gens ignorants et peureux. Des vaccins ont eu des effets dramatiques sur des populations (notamment le vaccin H1N1) et ont dû être arrêtés. L’exemple du vaccin de Sanofi est très parlant à ce sujet. 

Enfin, il est normal que le vaccin contre la covid-19 puisse inquiéter avant même d’en étudier les qualités et les défauts. Ce vaccin contre le coronavirus sera le premier vaccin proposé contre ce type de virus, le premier vaccin réalisé en un temps aussi court, certains vaccins contre la Covid-19 seront même les premiers vaccins à utiliser la technologie ARN, ces vaccins n’auront pas été testés dans les règles de l’art, au point que les fabricants sont dans l’impossibilité d’en apprécier l’intérêt des effets et les risques à six mois, un an ou deux ans. Il y a tant d’inconnues que la clause de non responsabilité des laboratoires, en cas d’effets secondaires des vaccins, actuellement négociée par les instances européennes, peut légitimement inquiéter la population. Tous ces éléments doivent a minima nous inciter à la prudence, à une exigence accrue de sécurisation de ces vaccins et de contrôle de leur processus de fabrication. Tous ces éléments, mis en parallèle avec la faible mortalité de la Covid-19, doivent nous conduire à écarter assez naturellement et logiquement le principe de l’obligation vaccinale.

Pour autant, on observe des tentations politiques fort inquiétantes au sujet de cette volonté de rendre obligatoire un vaccin qui ne devrait pas l’être. Ainsi aux Pays-Bas, la population manifeste avec succès pour que son parlement n’adopte pas une loi imposant l’obligation vaccinale. L’Allemagne a indiqué que ce vaccin ne serait pas obligatoire mais elle envisage tout de même de pratiquer une vaccination intensive.

Emmanuel Macron vient d’affirmer que le vaccin ne serait pas obligatoire. Pourtant, le président, le premier ministre et le ministre de la santé semblent voir dans le vaccin la solution à une sortie de crise, c’est inquiétant ? Pire, certains évoquent la punition qui serait infligée aux récalcitrants de la vaccination inutile : impossibilité d’aller au restaurant, dans les bars, dans les lieux de spectacle avec au final un confinement réservé à ces personnes. Une vraie vision totalitaire et odieuse de la mort sociale. Récemment une compagnie aérienne a indiqué qu’elle n’acceptera demain que les personnes vaccinées. On observe donc une tendance totalitaire à imposer le vaccin.

Les lecteurs de cet article diront à juste titre que cette propension à réduire les libertés n’est pas nouvelle. C’est vrai, mais on l’a vu, ces restrictions de liberté étaient adoptées pour lutter contre une maladie dont le taux de mortalité était 60 fois plus important que celui de la Covid-19. Surtout, entre ces articles cités en début d’article et aujourd’hui, il y a eu le régime nazi et ses sordides expériences médicales, le procès de Nuremberg et les principes qui en ont résulté pour constituer ce que l’on appelle le code de Nuremberg.

L’obligation vaccinale dans l’ombre des principes du code de Nuremberg et de nos libertés

Le code de Nuremberg délimite les conditions que doivent satisfaire les expérimentations pratiquées sur l'être humain pour être considérées comme « acceptables ». Une vaccination est-elle une expérimentation ? La réponse est oui quand on se propose d’injecter de force un vaccin nouveau, sans que les études sur ses effets secondaires aient été conduites selon les normes habituelles, alors même que certains vaccins seraient potentiellement susceptibles de modifier le patrimoine génétique d’un individu. Ce code met donc en forme une réflexion éthique et juridique sur l'expérimentation humaine en récapitulant une dizaine de principes connus et déclarés essentiels au titre desquels :

Imposer une vaccination contre la covid-19 violerait incontestablement ces quelques principes précédemment exposés.

Nos libertés semblent donc durablement menacées par cette crise sanitaire qui n’en finit pas. Christophe Barbier propose d’être coercitif de façon « intelligente » : si vous refusez le vaccin vous vous retirez de la vie sociale, vous êtes auto-confiné et vous êtes forcément un peu « complotiste », et votre comportement relève d’un phénomène obscurantiste inquiétant. Le leader écologiste s’est prononcé en faveur de la vaccination obligatoire au motif que le confinement ne peut plus durer, ce qui est vrai, mais ce confinement est-il la conséquence du coronavirus ou d’une gestion de crise exécrable ?

Aujourd’hui, le pays continue d’être confiné puis au confinement succédera le couvre-feu avant sans doute un nouveau confinement. Cette situation d’état d’urgence sanitaire permanent et de restrictions de liberté pourrait un jour conduire le gouvernement à imposer une obligation vaccinale perçue comme le sésame pour retrouver un semblant de monde d’hier. Il n’est pas anodin que le conseiller vaccin du président de la République soit un ancien lobbyiste des grands laboratoires.

Nous devons, plus que jamais, être vigilants et commencer à nous fédérer dans un mouvement de contestation pacifique, mais déterminé, contre une possible obligation vaccinale.

 


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