Vanneste, porte-parole du plus proche conseiller élyséen
par morice
jeudi 16 février 2012
On le sait, on l'a vu hélas, depuis cinq années de l'exemple du n'importe quoi en politique et d'une parole de la droite dite libérée par un Président aux propos et au comportement de charretier, les excès de langage sont devenus fort courants. Sur le net, d'aucuns n'hésitent pas à tenir les pires avis, on l'a encore vu ici-même avant hier avec mon article sur un nouvel ouvrage expliquant la fuite des nazis en Argentine, où une contributrice (ou plutôt un contributeur ayant pris forme féminine) est venu énoncer tranquillement à la fois que l 'homme n'avait jamais marché sur la Lune et que les chambres à gaz n'avaient pas existé. Des propos négationnistes, ceux qui pullulent sur le net depuis des années maintenant, et qui sont hautement condamnables bien entendu. Or un pas de plus vient d'être atteint dans cette escalade de l'imbécillité en la personne d'un élu, un député du nord, Christian Vanneste, qui vient tout simplement de déclarer avant hier qu'il n'y avait jamais eu de déporté homosexuel français, ce qui l'expose direct à une condamnation judiciaire... pour négationnisme. La place de Christian Vanneste, connu comme député homophobe, est désormais en prison, au nom de cette loi Gayssot qui prouve encore une fois sa nécessité comme garde-fou aux déclarations inconsidérées, ici faite par quelqu'un possèdant mandat représentatif, qui plus est. Les propos du député, déjà condamnés par tout le monde, et par ailleurs contributeur occasionnel d'Agoravox, sont inqualifiables et exigent sa mise en examen pour négationnisme, rien de moins. Mais derrière lui se cache un autre homme, qui habite l'Elysée.
Les propos honteux de Christian Vanneste, favorable rappelons-le aux liens avec le FN, ont été faits sur le site de "liberté politique.com", le site de l'éditeur chrétien Thierry Boutet, ancien éditorialiste à l'hebdomadaire Famille Chrétienne et quui a aussi été le directeur de la rédaction du Temps de l'Eglise et des Cahiers d'Edifa.
La déportation des homosexuels a bien été le fait des nazis, et elle a été globale et non limitée à un seul pays. Des faits, et des écrits, le montrent, tel déjà le discours d'Himmler du 18 février 1937, à Bad Tölz, devant des officiers SS, qui déclarait, comme avait déjà tenté de le faire Vanneste lui-mêle que l'homosexualité était une "maladie" : « Si j'admets qu'il y a 1 à 2 millions d'homosexuels, cela signifie que 7 à 8% ou 10% des hommes sont homosexuels. Et si la situation ne change pas, cela signifie que notre peuple sera anéanti par cette maladie contagieuse. À long terme, aucun peuple ne pourrait résister à une telle perturbation de sa vie et de son équilibre sexuel... Un peuple de race noble qui a très peu d'enfants possède un billet pour l'au-delà : il n'aura plus aucune importance dans cinquante ou cent ans, et dans deux cents ou cinq cents ans, il sera mort... L'homosexualité fait échouer tout rendement, tout système fondé sur le rendement ; elle détruit l'État dans ses fondements. À cela s'ajoute le fait que l'homosexuel est un homme radicalement malade sur le plan psychique. Il est faible et se montre lâche dans tous les cas décisifs... Nous devons comprendre que si ce vice continue à se répandre en Allemagne sans que nous puissions le combattre, ce sera la fin de l'Allemagne, la fin du monde germanique. » En France comme ailleurs, des homosexuels seront déportés, à Dachau même le chiffre étant de 583 toutes nationalités confondues (au jour de la libération il en restait 109 ayant eté répertorié (d'après les travaux faits par Albert Knoll, archiviste au Mémorial de Dachau, basés sur les fichiers du camp et les demandes d'indemnisation après la guerre, Albert Knoll, Totgeschlagen-totgeschwiegen. Die homosexuellen Häftlinge im KZ Dachau, im Dachauer Hefte 14 (Les Cahiers de Dachau)). Himmler parlant des homosexuels comme atteints d'une "maladie psychique", voilà qui sonne étrangement aujourd'hui... où l'on entend des termes comme "aberration anthropologique", provoquant la fin d'une... civilisation. Des gens au comportement « contre-nature » nécessitant une « rééducation » avait dit Himmler (et non Vanneste).
L'histoire même de Rufolf Brazda prouve toute l'ineptie d'un député qui ignore l'histoire, comme le font en général les négationnistes : Né en 1913 en Saxe (Allemagne) dans une famille tchèque germanophone, Rudolf prend conscience de son homosexualité comme "une disposition naturelle qu'il accepte comme telle, conscient d'avoir eu la chance d'avoir toujours eu un compagnon à ses côtés", racontait-il. En 1937, il est condamné à six mois de prison pour "débauche entre hommes", puis expulsé vers la Tchécoslovaquie. Là, après l'annexion des Sudètes par Hitler, il est à nouveau jugé et condamné pour le même type de faits, cette fois à 14 mois de prison.Cette peine purgée, Rudolf, considéré comme un récidiviste, est interné au camp de concentration de Buchenwald, dans le centre de l'Allemagne. Il survécut à 32 mois d'enfer dans ce camp, grâce à son amitié avec un kapo communiste et à "un peu plus de chance que les autres". Ah, mais voilà, vous allez me dire, Brazda n'était pas français au moment des faits et ne l'est devenu que bien après la Libération, en venant vivre en France. Ce en quoi il est facile de répondre que sa médaille de la légion d'honneur lui a été attribué pour déportation, la France reconnaissant ainsi une forme d'antériorité française à l'individu. En fait, comme tout révisionniste, Vanneste fait reposer ses dires sur le fait que Vichy n'avait pas selon lui rédigé de texte spécifique sur la déportation des homosexuels français : l'argutie habituelle des négationnistes pour affirmer qu'aucun français n'aurait porté le triangle infâme. Ce sont les mêmes propos qu'avaient ressortis récemment des négationnistes, qui eux aussi ignoraient visiblement l'histoire.
Les brimades que subira Brazda et qu'il n'arrivera pas à énoncer avant 2008. "Le 28 avril 2011, au collège Maréchal Leclerc de Puteaux, il recevait de Madame Marie-José Chombart de Lauwe, présidente de la Fondation pour la Mémoire de la Déportation, son insigne de Chevalier dans l'Ordre national de la Légion d'honneur. Cette distinction récompensait Rudolf Brazda pour son parcours de déporté, mais surtout pour son engagement à transmettre la mémoire auprès des jeunes générations et du grand public" avait expliqué la presse de l'époque. La remise elle-même de la décoration avait été faite en territoire français, à un français, par la présidente française de la Fondation pour la Mémoire de la Déportation (et sur recommandation du premier ministre de France !) ! Français, depuis peu, pour la simple raison qu'il avait été déclaré apatride, et que d'en évoquer la raison était douloureux "patride à partir de 1947, avant d'être naturalisé français en 1960, il garda le silence sur les motifs de sa déportation jusqu'en 2008. Cette même année, l'annonce de l'inauguration prochaine d'un mémorial aux victimes homosexuelles du nazisme à Berlin poussa des proches à l'inciter à se faire connaître". Rappelons que jusqu'à une époque récente, le simple fait de parler d'homosexuels lors des commémorations était l'objet de vives critiques et de rejets. C'est Lionel Jospin qui avait mis fin à ces manifestations en 2001, après que plusieurs gerbes aient été piétinées. "En 1976, la première gerbe déposée illégalement au mémorial de l'île de la Cité avait été piétinée par un membre d'une association officielle de déportés : « Cette gerbe salit la mémoire de millions de martyrs. » Légitimation. Depuis, les incidents se multiplient chaque dernier dimanche d'avril. En 1985, à Besançon, six homosexuels avaient été blessés par une dizaine d'anciens déportés tandis qu'on entendait crier « on devrait rouvrir les fours pour eux ». Il y a trois ans, le maire de Reims avait barricadé l'accès au mémorial, et à Caen, Lille ou Lyon, les militants arborant le triangle rose signe distinctif des homosexuels ont été refoulés. Depuis l'an dernier pourtant, le rabbin de Rouen convie les homosexuels au chant des morts à l'issue du dépôt de gerbe" rappelait fort justement Libération Suite à cette décision, une commision nommée par La Fondation de la Mémoire, qui regroupe les associations de déportés, avait été décidée pour enquêter sur ces déportations.
Un colloque organisé à Dijon en 2007 sous l’impulsion de Mickaël Bertrand, où l'on avait pu obtenir (enfin) des précisions importantes. "Arnaud Boulligny qui mène une recherche pour la Fondation pour la Mémoire de la Déportation (FMD) dresse l’état actuel des connaissances pour la France. Les recherches sont menées depuis les années 1990 : « En 1997, sous la pression toujours plus forte des militants associatifs » et « afin de pacifier les tensions récurrentes qui s’exercent autour des cérémonies commémoratives » (p.13), le ministère des Anciens Combattants avait commandé une étude à la FMD dont les résultats furent rendus publics en 2001. La première recherche a été dirigée par Claude Mercier ; son rapport évoquait alors 210 hommes arrêtés et déportés. La recherche poursuivie par Arnaud Boulligny a affiné ces données. A l’heure actuelle, le bilan s’établit à 62 hommes de nationalité française, persécutés pour motif d’homosexualité durant la Seconde Guerre en France. Parmi les 210 hommes identifiés par la première recherche en 2001, seuls 14 étaient en fait de nationalité française, les autres, de nationalité allemande, avaient été envoyés d’Allemagne au camp de Natzweiler. Pour les 62 hommes français persécutés désormais identifiés, plusieurs situations sont à considérer en fonction du statut du territoire. Les peines varient entre emprisonnement, déportation/internement dans un camp – différence provenant ici du passage d’une frontière.
- 2 Cette législation a survécu après la guerre : la RFA a gardé la version de 1935 jusqu’en 1969 ; la(...)
6-22 hommes furent arrêtés dans les provinces annexées (Alsace, Lorraine, Moselle). Dans ces régions, la législation allemande fut appliquée : le dispositif répressif est incarné par le « § 175 » qui datait de 1871 et qui fut renforcé par les nazis en 1935. 4 de ces 22 hommes ont été emprisonnés, les autres furent internés à Natzweiler ou Schirmeck, camps situés sur le territoire annexé.
7-32 Français furent arrêtés sur le territoire du Reich : il s’agit d’hommes jeunes qui travaillaient en Allemagne, la plupart dans le cadre du STO. 30 sont condamnés à la prison en Allemagne et 2 envoyés à Natzweiler.
8-A l’heure actuelle, on recense 7 Français arrêtés sur le territoire national. Parmi ces 7 cas, si l’homosexualité est un facteur mentionné dans l’arrestation, la plupart ne fut toutefois pas déportée exclusivement pour ce motif. 6 d’entre eux sont déportés à Buchenwald et Neuengamme.
9-1 Français fut arrêté dans un lieu qui reste indéterminé et transféré à Natzweiler.
10-13 de ces 62 hommes sont morts en détention. Outre les peines de déportation, internement, emprisonnement, les nazis ont aussi « évacué » des homosexuels vers la France dite « libre ». D’une manière générale, il n’y a donc pas eu de persécution systématique. A noter qu’à ce jour, tous les dossiers de déportés ne sont pas dépouillés - 40000 des 68000 dossiers conservés au Bureau des Archives des Victimes des Conflits Contemporains (BAVCC) ont été ouverts. De nouveaux cas sont donc susceptibles d’apparaître. De n'avoir pas été "systématique" ne signifie donc pais que la traque n'a pas existébque n'a pas existé, même si en France elle à été limitée. Le chiffre de 62 (et de 13 morts en déportation) donné par les recherches historiques qu'on ne peut remettre en causée ruine donc totalement les propos de Christina Vanneste comme quoi aucun ne l'avait été, de déporté. C'est le propre du révisionnisme, qui, si on ne tâcle pas tout de suite, conduit invariablement au négationnisme.
En honorant la mémoire de Rudolf Brazda, nous réaffirmons notre engagement à promouvoir les valeurs de respect et de tolérance qui sont le fondement même de notre démocratie. » (ici le message du Ministre)" Depuis quand la nation rend-t-elle les honneurs à une personne qui selon le député de Tourcoing n'a jamais existé ?
Voilà qui est absolument lumineux comme analyse, car elle nous donne à la fois la clé du discours vannestien (la virilité et l'homosexualité) et celle d'un pouvoir en place réduit à aller draguer de plus en plus profond chez les anciens lecteurs de Minute et du Crapouillot, machistes d'extrême droite, pour assurer un semblant d'assentiment à la politique actuelle qui ne fait qu'exclure. "Catholique pratiquant sans être intégriste, amateur de chants grégoriens et polyphoniques, Buisson a le nationalisme dans la peau et l’anticommunisme comme marque de fabrique. Il n’a jamais renié ses idées d'alors. Des idées qui ont d’ailleurs fait de lui l’homme qui murmure à l’oreille du président" nous dit IL Foglio qui ajoute : "car c’est bien lui qui suggéra à Sarkozy, à l’hiver 2007, de dramatiser la question de l’insécurité en profitant des échauffourées à la gare du Nord [à Paris] entre forces de l’ordre et jeunes d’origine maghrébine (***). C’est lui encore, et non son pendant républicain Henri Guaino, qui aurait soufflé au candidat UMP d'envisager de créer un ministère de l’Immigration et de l’Identité nationale en mars 2007. "Pour ma gauche, j’ai Guaino, pour ma droite, j’ai Buisson", résumait fièrement Sarkozy". En ce sens, la saillie (c'est bien le nom !) de Vanneste révèle davantage l'état d'esprit de l'Elysée qu'on ne pense !!! La pensée "libérée" d'un Vanneste sort bien d'une vanne largement ouverte depuis cinq ans par l'Elysée en personne !!! Sarkozy a son Karl Rove il peut entamer une campagne que le Canard Enchaîné nous présente ce jour comme ayant pour modèle celle de Bush de 2004 ! Selon l'hebdomadaire, et d'après une phrase de JM Bockel, l'un des baisés de l'ère Sarko, "Sarkozy ne chasse pas sur les terres du FN, il chasse le FN de ses terres !"
(*) visiblement, je ne suis pas le seul à parler de refoulement : chez Slate, c'est une descente en flèche carabinée :
L'auteur y attaque en prime Vanneste sur son propre révisionnisme de carrière, selon lui revue... et fortement corrigée.
(**) Comme par hasard, la campagne est venue de ce site "dont le directeur est Julien Landfried, fondateur du groupe chevénementiste Génération République et Frédéric Beck (directeur du site internet « Revue républicaine » et vice-président de l'association des jeunes gaullistes Appel d'R), réputé proche de Nicolas Dupont-Aignan, et François Devoucoux du Boysson (directeur du « Perroquet Libéré » et auteur de l'ouvrage « Les Khmers roses : Essai sur l'idéologie homosexuelle »). Cet observatoire se veut indépendant de tout groupe politique. Il s'est fait remarquer par son opposition au mariage homosexuel et des articles sur des personnalités controversées telles qu'Alain Soral ou le député Christian Vanneste." Le deuxième fondateur du Canard est aussi Max Dupré, traducteur de "Moeurs sexuelles exotiques", l'adaptation française du livre "Ferne Laender, fremde Sitten", du Dr Herbert Lewandowski : on a affaire à de sacrés tourmentés du tuyau d'arrosage, là. En somme, cet "observatoire" a donc largement préparé le terrain pour Ch.Vanneste, car il le publiait régulièrement. Comme par hasard aussi, du Buysson à un parent (on suppose qu'i s'agît de la même famille, peut-être son frère ?) qui est fervent catholique et qui est plutôt lui aussi bizarrement hanté par la religion et le sexe en général, au point d'écrire un "Dialogues avec Marie-Madeleine", où l'on peut lire en exergue : "Marie Madeleine demeure un personnage profondément énigmatique. Était-elle une prostituée ou, plus simplement, une femme “libérée” et indépendante ? A-t-elle été l’amante du Christ ? " . Le gag ultime étant que ce Philippe est un "Frère", mais d'abbaye, celui-là !
(***) j'ai une autre interprétation sur comment "dramatiser" je vous en ferai part bientôt !
(*****) selon Thierry Mariani, du mouvement où est inscrit Vanneste, ce dernier est donc bien négationniste : "le ministre des Transports Thierry Mariani a, lui, publié, mercredi matin, plusieurs tweets sur son compte. "J’ai mené avec Christian Vanneste bien des combats et nos points de vue se rejoignent sur bien des sujets". "Pour autant, je ne peux me résoudre à le laisser continuer à s’engager sur le terrain de la provocation et sur celui du négationnisme", écrit le co-fondateur et chef de file de la Droite populaire. "S'en prendre aux homosexuels est injustifiable et incompatible avec les valeurs de notre famille politique", conclut-il dans un dernier tweet." Selon la loi Gayssot, il encourt donc pour "contestation de l'existence de crimes contre l'humanité définis par le statut du tribunal international de Nuremberg de 1945" un peine d'emprisonnement de 1 an, et une amende de 45 000 €.
PS : la photo de l'hommage à Rudolf Brazda est de Quentin-Luc Lecomte.