Vel’ D’hiv : Chevènement en désaccord avec Hollande. Ni la France ni les Français ne sont responsables du génocide des juifs

par guylain chevrier
jeudi 26 juillet 2012

Selon Jean-Pierre Chevènement, le président d'honneur du MRC, François Hollande fait "comme si Pétain était la France"(http://www.chevenement.fr/)

Il a exprimé lundi dernier, sur son blog son désaccord avec François Hollande, qui a déclaré dimanche que la rafle du Vel d'Hiv fut un crime "commis en France, par la France". Il regrette que François Hollande "a malheureusement omis de dire que les crimes commis par les policiers et les gendarmes français, lors de la rafle du Vel d’Hiv, l’ont été sur l’ordre de l’Etat français de Vichy collaborant avec l’Allemagne nazie."

Selon lui, tenir un tel discours, "c’est occulter les accords passés avec la gestapo par René Bousquet, alors secrétaire général de la police, agissant pour le gouvernement de Vichy. C’est faire comme si Pétain était la France et comme si le véritable coup d’Etat opéré le 10 juillet 1940 par un gouvernement de capitulation n’avait pas existé."

Jean-Pierre Chevènement rappelle que "deux Présidents de la République, Charles de Gaulle et François Mitterrand, avaient tenu sur la ligne selon laquelle l’Etat français de Vichy n’était ni la République ni la France."

On remerciera ce républicain pour son courage politique, qui plaide en faveur d’une « France qui a besoin d’une conscience claire de son histoire si elle veut la poursuivre. »

François Hollande a ouvert une boite de Pandore qui fait le lit de l’anti-France

Dans le prolongement de cette critique constructive, que ne lit-on pas à la suite de cette déclaration inique et déconcertante de François Hollande. Il a ouvert une boite de Pandore. Sur Agoravox même on va jusqu’à dire que ce serait non seulement la France, mais « les Français » (Rafle du Vel’ d’Hiv : la France ou les Français ?- http://www.agoravox.fr/actualites/citoyennete/article/rafle-du-vel-d-hiv-la-france-ou-120380), qui se seraient rendus responsables du pire, concernant les responsabilités du Vel’ d’hiv et de façon plus générale du drame des juifs, de cette barbarie sans nom. Hollande a en quelque sorte donner un feu vert au déferlement du sentiment anti-France de certains qui n’attendaient que ce signe pour répandre ce poison qui nourrit des ressentiments qui ne nous promettent pas de lendemains qui chantent mais toujours plus de haine qui renforce les extrêmes. A quand ensuite la demande de vote à l’Assemblée nationale de la reconnaissance devant l’histoire de la France comme génocidaire des juifs ? Allons donc au bout !

Cette relecture qui rend « les Français » responsables des exactions d’un régime au service des nazis, vaut celle d’un FN qui à l'autre bout disserte sur l'existence ou pas des chambres à gaz de façon toute aussi obscène. C’est une déformation des choses contre le sens de l’histoire qui identifie la collaboration de façon incroyable aux Français ! On renvoie ainsi la responsabilité de la déportation aux initiatives de dénonciations individuelles, au peuple de France… Une ignominie, mais qui n’aurait jamais pu voir le jour sans cette confusion gravissime orchestrée par le président de la République.

Qu’est-ce que dit l’histoire ? Tout le contraire de cette France et des Français qu’on diffame !

Des initiatives individuelles des Français que les trains de la mort ? Les opérations de ratissage systématiques rue par rue en 1943 à Paris ? Les visites systématiques d’écoles par la police et la milice pour repérer ceux qui étaient circoncis ? Les lois anti-juives qui s'appliquent sur l'ensemble du territoire, les décrets allemands et l'étoile jaune, l’infâme exposition antisémites du régime dès septembre 1941“Le Juif et la France” » « le juif sus ! » ? Les Brigades Spéciales (BS) des Renseignements Généraux, qui constituent 10 % des effectifs de chaque commissariat, spécialisées dans la traque aux « ennemis intérieurs » aux communistes et aux juifs et plus tard aux réfractaires au STO (Celle-ci formait régulièrement des barrages filtrant dans le métro et établissait des contrôles au faciès) ? L’action de René Bousquet qui coordonne la police sur le territoire au-delà de cette police spéciale qu’il met en totalité au service de cette épouvante, la création par Pierre Pucheu, ministre de l'Intérieur, d’une Police aux questions juives (PQJ) par un arrêté du 19 octobre 1941 (non publié au Journal officiel : seul le Commissariat général aux questions juives (CGQJ), la police nationale de Bousquet et la Gestapo est au courant) ? Les organisations politiques d’idéologie fasciste qui sont créés dans le cadre du régime qui prônent le principe de la collaboration politique (Rassemblement national populaire (RNP), Parti populaire français (PPF) ou militaires (LVF) qui jouent pleinement ici leur rôle… ?

Avec la rafle du Vel’ d’hiv, ce sont tous les juifs étrangers que Bousquet propose d’arrêter, faciles ainsi à identifier en raison des fichiers spéciaux établis à partir de l’état-civil et des services de renseignement, selon une préparation minutieuse. C’est tout un appareil d’Etat qui a été au service de l'innommable ! Les dénonciations n’ont pas manqué certes, et par trop nombreuses, mais comme me le confiait un jour passé un des plus jeunes résistants de France, le défunt poète regretté Jean-Pierre Rosnay(†19.12.2009 -http://www.livreshebdo.fr/les-gens/actualites/jean-pierre-rosnay-rejoint-le-club-des-poetes-disparus/3844.aspx), la Résistance n’aurait jamais tenu si elle n’avait été aidée et soutenue par une part non négligeable de la population. De ces individus ordinaires qui font justement l’histoire dont le courage n’éclate pas nécessairement au grand jour et resteront des anonymes essentiels.

L’Etat pétainiste n’était pas la France !

Sans l'Etat pétainiste tout cela aurait été rendu impossible, et non de l'Etat français puisque la France avait été vaincue et défaite, encore moins de cette France dont la République était hors la loi et sa constitution abolie. Pourquoi vouloir faire assumer aux Français ce qui fut le fait de collabos ayant investi l'Etat pour aider l'occupant à la réalisation de son grand projet de "solution finale. Cet acharnement à taire des responsabilités en en accusant d'autres pour les leurs faire endosser est suspecte d’intentions qui peuvent nous donner le frisson dans le dos. Il y a des affirmations qui n'engagent pas que ceux qui les font, mais une relecture de l'histoire de la France et de son peuple qui peut légitimement s’en sentir diffamer !

On veut faire oublier que ce fut un système au service d’une machine de destruction massive, d’un génocide. Laisser planer cette confusion c’est un péril mortel pour notre liberté.

Quant aux pleins pouvoirs à Pétain, la démocratie était déjà saccagée avec un parti communiste interdit, une élite qui avait trahi et un pouvoir politique d’une France défaite qui ne représentait déjà plus rien dont d’ailleurs le tiers avait déjà choisi la fuite ou l’absence. Seuls 670 (sur les 907 parlementaires) prennent part au vote - qui n’est qu’un sabordage « légal » de la République, qui met la France entre parenthèses pour quatre ans, des plus sombres de l’homme.

De la trahison des élites à la conquête de la liberté : La France c’est la République !

Ce ne fut pas plus le fait d’initiatives individuelles des Français que de la France ni de la République, on en jugea d’ailleurs quelques-uns des principaux responsables accusés d’avoir trahi et commis l’irréparable, eux, pour de bon. Mais on en laissa bien trop de coté aux mêmes manettes comme un certain Papon.

Et pour finir, il n’y a qu’une voie, celle de ne pas renoncer à cette France belle de son histoire dont les racines sont profondément ancrées dans les idéaux de la Révolution française, avec un modèle politique, une République indivisible, démocratique, laïque et sociale que le monde entier nous envie, pleine de cet humanisme débordant de révolutions et de mouvements sociaux à la conquête de notre liberté.

Laissons la conclusion à Jean-Pierre Chevènement : « La France a besoin de retrouver confiance en elle-même. Elle ne pourra le faire que sur la base d’une conscience claire de son Histoire. La vérité exige que le débat continue » 

Guylain Chevrier, historien, formateur en travail social, petit-fils de juif déporté de France.


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