Vous avez dit HPI

par Alain Roumestand
mercredi 14 juin 2023

Aujourd'hui les mots HPI, hyperactivité, sont galvaudés. Ne parle-t-on pas d'un président hyperactif, d'une série télévisée "HPI", d'un élève hyperactif, de parents d'enfants hyperactifs, certains fiers de cette qualification, d'autres affolés, bousculés.

Qu'en est-il réellement de l'hyperactivité ? 2 ouvrages pratiques, récemment parus, traitent de cette question avec professionnalisme et intelligence.

Le premier s'intitule "Je suis hyperactif(ve) et alors ?" avec en sous-titre "Le TDA/H expliqué aux enfants". Il s'agit de "parler des troubles de l'attention avec son enfant", de " lui expliquer leurs implications", de " l'aider à apprivoiser ses troubles" et de " gérer son hyperactivité, son impulsivité". Ce livre est largement illustré par Mathias Rebuffé (de petites BD entre autres) et constitue une véritable boîte à outils avec cahier d'exercices, avec des compléments à télécharger ( sophrologie, méditation, météo des émotions). On trouve même une charte familiale d'utilisation des écrans. L'autrice Catherine Viès-Duffau est thérapeute, elle-même mère de 3 enfants haut potentiel,directrice d'une école associative à pédagogie alternative. Elle a une chaîne YouTube.

Le deuxième livre c’est "Mon enfant est hyper" : "Anxiété, émotivité, troubles de l'attention et du sommeil... aidez votre enfant au quotidien". "Le cerveau des enfants HPI et hypersensibles fonctionne plus rapidement et plus intensément". Catherine Assenheim neuropsychologue, fondatrice de " l'HyperAcademy", l'autrice, elle-même mère d'un "petit hyper", donne des clés pour aider l'enfant à " développer son potentiel unique". Là aussi des conseils pratiques et des outils illustrés. L'illustratrice Judy a créé 2 mascottes pour les enfants. 

Catherine Viès-Duffau considère que les enfants n'ont pas de plus en plus de problèmes mais que la connaissance neuroscientifique est telle que" chaque difficulté est analysée pour trouver une explication valable". Elle note par ailleurs que " certains enfants ont un planning de ministre, rempli d'activités extra-scolaires, de bilans, de prises en charges diverses... Quand ont-ils l'opportunité de s'ennuyer ?". Il s'agit donc d'accepter l'enfant tel qu'il est, " certains sont différents, imparfaits, vivants, pleins d'émotions et c'est ainsi"."Certains arrivent à gérer leur #TDA/H et c'est super ! Pour d'autres c'est un véritable calvaire".

Mais d'abord qu'est-ce qu'un TDA/H ? Ces lettres signifient Troubles Déficitaires de l'Attention avec ou sans Hyperactivité. C'est un trouble comportemental et neurologique. Le cerveau fonctionne en permanence. 5 à 10 % des enfants ont un TDA/H. Les symptômes peuvent s'atténuer avec l'âge. Certains symptômes du TDA/H ressemblent très fort à d'autres troubles comme des troubles " dys" ou au haut potentiel.

Et il y a " plein d'astuces pour améliorer le quotidien". L'enfant TDA/H n'est pas un fainéant, n'est pas un enfant qui bouge tout le temps. Et un hyperactif qui ne peut rester sans rien faire ni penser, qui bouillonne, n'est pas nécessairement un TDA/H. C'est un trait de personnalité. L'enfant TDA/H n'est pas bête, n'est pas malade. Il est " capable d'arriver aux mêmes résultats que les autres enfants, mais son " chemin sera parfois plus compliqué". Par exemple la concentration s'améliore en la travaillant. On peut aussi apprendre à travailler sa " pensée qui part dans tous les sens". Méditation et sophrologie sont alors précieuses. Parler est aussi essentiel, notamment aux enseignants de l'enfant, lorsque la dépense d'énergie pour rester concentré et apprendre, apporte une grande fatigabilité. Une bonne hygiène de vie est essentielle (sommeil tôt, sans écran avant et alimentation saine et équilibrée)

Pour s'organiser le TDA/H peut se faire des listes (matériel du cartable par exemple), des plannings, avec les tâches à accomplir, à afficher. Les actions que l'enfant doit effectuer peuvent être accompagnées de points négatifs ("pourquoi je ne veux pas faire telle chose ?") et des points positifs ( si on passe à l'action au lieu de l'ignorer). Être fier de soi après avoir accompli une action, c'est motivant pour la suite. Savoir pour un enfant TDA/H qu'il mémorise aussi bien qu'un autre, mais que son TDA/H l'empêche parfois de se souvenir de ce qu'on lui a dit ou de ce qu'il a vu, va lui permettre d'intégrer différents exercices pour travailler son attention, avec une seule tâche à la fois, en décortiquant les instructions, toutes les tâches qu'une consigne implique, comme "ranger sa chambre". L'exercice de se remémorer les actions d'une journée complète est utile, étape après étape.

Le TDA/H peut être à dominante hyperactive-impulsive avec instabilité motrice, intolérance au délai, intolérance à la frustration, hyperémotivité, dépendance aux jeux vidéo. Et là la cohérence cardiaque, la personne ressource, "l'adulte de confiance" à qui l'on parle, la balle anti-stress, le cahier où l'on note tout ce qu'on a envie de dire, la charte d'utilisation des écrans que l'on confectionne à la maison, sont des éléments indispensables pour agir.

Le TDA/H entraîne des difficultés mais il ne faut pas occulter les " super-pouvoirs des TDA/H". L'hypersensibilité est un super-pouvoir de créativité, d'invention, d'originalité, d'innovation. L'hyperactivité présente aussi du positif, notamment par le sport qui peut par ailleurs limiter l'anxiété, les difficultés de socialisation, l'agressivité. L'hyperfocalisation, concentration capable de durer sur une tâche très précise, peut être aussi un atout. Des artistes, écrivains, sportifs sont ou ont été des TDA/H : Gustave Flaubert, Emma Watson, Justin Timberlake, Shakira, Michael Jordan, Serena Williams...

Et l'autrice de "Je suis hyperactif(ve) et alors ?", de conclure, en s'adressant à l'enfant TDA/H :" Sois heureux".

Assertion positive comme peut l'être Cathy Assenheim, qui est très direct, dans son livre " Mon enfant est Hyper". Elle s'adresse à lui, enfant de 9 ans, en dédicace : "A mon fils. Ne change surtout pas, tu es un petit garçon formidable". Avec cette citation d'un auteur inconnu :" Les enfants sont comme des papillons dans le vent. Certains peuvent certes voler plus haut que d'autres... Mais chacun vole à sa façon et à son rythme. Pourquoi donc les comparer ? Tous arrivent à destination." 

D'abord des définitions, après le constat " Être hyper ce n'est pas grave". C'est quoi un cerveau hyper ? C'est quoi le haut potentiel ? C'est quoi l'hypersensibilité ? En partant de l'idée qu'un fonctionnement cérébral atypique influence la biologie, les hypersensibles peuvent souffrir de fatigue, de troubles du sommeil, de symptômes dépressifs, d'adduction au sucre, de dysbiose intestinale, de sensibilité immunitaire et peuvent présenter un risque accru de burn out.

Des cerveaux hyper, on en trouve dès l'antiquité et les enfants appelés précoces ont toujours existé. Le haut potentiel n'est pas une pathologie. "Il n'y a rien à traiter ou à guérir". Le cerveau hyper à " une manière spécifique de fonctionner" avec "des neurones particulièrement actifs et réactifs". Des informations trop nombreuses apportent une saturation et des débordements à gérer. Avec le cerveau gauche dans les zones cognitives : le haut potentiel. Avec le cerveau droit, " acteur principal des capacités d'adaptation à l'environnement", dans les zones émotionnelles : l'hypersensibilité. Ces particularités cérébrales sont génétiques, mais l'environnement a également une incidence.

Le haut potentiel c'est la conséquence d'une hyper-réactivité cérébrale gauche dans les zones des fonctions intellectuelles. Tout en sachant que " le haut potentiel... n'est pas un gage de réussite scolaire ni professionnelle". Quand il y a haut potentiel et une hypersensibilité, le HPI peut entraîner des difficultés d'adaptation fortes. Le HPI a un raisonnement plus rapide avec une vitesse de traitement de l'information plus élevée( rien ne lui échappe lorsqu'il y a discussion), avec un sens de l'humour très fort. Mais il faut que le HPI soit intéressé. Sinon...

L'hypersensibilité est émotionnelle mais aussi sensorielle. Les hypersensibles comprennent intuitivement les émotions et les besoins des autres. On peut parler de 6ème sens. Le visuel, l'auditif, l'olfactif, le tactile, le gustatif sont exacerbés. Ce qui dope la créativité, la mémorisation, l'altruisme, le sens de la justice. Le revers de la médaille : le trop plein, la saturation peuvent entraîner un repli sur soi pour se protéger et l'irritabilité.

Dans tous les cas " mieux vaut un enfant avec des émotions et des sensations exacerbées... qu'un enfant se contrôlant à l'extrême", les dérapages de " l'hypersensibilité pouvant être masqués par une distanciation intellectuelle". En agissant très tôt, l'enfant ayant des capacités de reprogrammation très rapides, on peut changer les choses. Et c'est la partie 2 du livre dans laquelle l'autrice fait appel à Emmanuelle Sutherland praticienne en réflexes archaïques et à Maya Dedecker thérapeute alimentaire. Elle apporte des moyens d'action concrets, des conseils, des techniques, des recommandations pratiques, des illustrations destinées à l'enfant lui-même, mais aussi des conseils de lecture pour les adultes et les enfants.

Il faut éviter "la mode des étiquettes qu'on accole aux enfants." Il faut sortir de cette mode du diagnostic hyper que l'on pose parfois même à des enfants qui ne rencontrent aucune difficulté. Ce n'est pas parce qu’un enfant fait de fréquentes crises de colère qu'il est hypersensible, ni parce qu'il pose beaucoup de questions, qu'il présente un haut potentiel intellectuel". " La génération actuelle exprime plus ses émotions, recherche davantage son bien-être et accepte mieux les différences".

Optimisme donc...

 


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