Woerth : passible de poursuites pénales pour blanchiment ?

par Aimé FAY
jeudi 22 juillet 2010

En matière de crime et de délit, notre code pénal est clair et très précis. En matière de blanchiment d’argent il est, depuis le 13 mai 1996, extrêmement sévère. Son champ d’application étant large, il se pourrait que Woerth tombe sous le coup de l’article 324-1, qui dit en l’espèce :

"Il y a blanchiment [...] du simple fait d’apporter son concours à une opération de placement, de dissimulation [...] du produit direct ou indirect d’un crime ou d’un délit. Le blanchiment est punissable de 5 ans d’emprisonnement et de 375 000 euros d’amende".
 
Pour tomber sous l’inculpation de cet article encore faut-il que le délit soit constitué.
 
Dans l’affaire de la Dame Bettencourt, il n’y a pas crime. Mais, le délit semble bien constitué puisque que la Dame a reconnu de son plein gré la fraude fiscale, telle que l’article 1741 du code général des impôts le décline. Reste à savoir qui a commis le délit, l’a facilité ou lui a directement ou indirectement apporté son concours ?
 
Dans cet esprit, on pense tout de suite à l’épouse Woerth. L’article 324-1 lui est-il applicable ? Que sait-on de l’épouse Woerth qui justifierait une si grave implication ?
 
On sait :
 
1° Qu’elle avait en charge, dans le cadre de son travail de salariée dans le cabinet de conseil fiscal dirigé par M. De Maitres, une partie de la gestion des fonds de la fortune de la Dame Bettencourt.
 
2° que, pour son époux, Florence Wœrth est une femme extrêmement brillante en matières financières et fiscales. D’ailleurs, tellement brillante, qu’elle n’aurait pas eu besoin de lui − et qu’il prenne le risque d’un conflit d’intérêt − pour être embauchée par M. De Maitres, patron du cabinet de conseil fiscal de la Dame Bettencourt.
 
Alors, on pourrait penser que les carottes sont cuites car "il y a blanchiment du simple fait d’accorder son concours à un délit [...]". Et que, c’est dans ce cadre que Florence Woerth aurait été interrogée, hier lundi 21 juillet 2010, par la police ! Cela est cohérent. En effet, comment une personne aussi brillante que l’épouse Woerth, s’occupant de la gestion des fonds de la riche Dame, pouvait-elle ignorer qu’elle fraudait ?
 
Si elle l’ignorait et que sa bonne foi est reconnue, l’article 324-1 du code pénal n’est pas applicable à la dame Woerth. Dans le cas contraire, il se pourrait bien qu’elle tombe dedans.
 
A moins que, nous dira-t-on peut-être… qu’elle n’était pas à l’époque aussi brillante que ça. Cela se plaide dirait un bon avocat !
 
Mais, les carottes ne sont pas cuites du tout !
 
En effet, aussi surprenant que cela puisse paraître, l’épouse Woerth n’aurait pas été interrogée hier dans le cadre de l’article 324-1 du code pénal.
 
Elle aurait été interrogée, quasiment à sa demande, pour redire à la police que son embauche par le cabinet De Maistre, pour s’occuper de la Dame Bettencourt, n’aurait pas été suscitée par son époux Eric, à l’époque ministre du budget et des fraudes fiscales, MAIS simplement grâce à ses compétences pointues en matière de gestion de fortune et de fiscalité. 
 
Bon ! bien que la cause de cette audition soit extrêmement choquante, nous pensons que durant cet entretien, l’épouse Woerth a dû faire l’erreur de vanter ses qualités de professionnelle très affûtée en matière fiscale… pour expliquer sa présence dans le cabinet De Maistre.
 
Si tel est le cas, on ne voit pas comment la rigueur de l’article 324-1 du code pénal pourrait lui être évitée.
 
De fait, nous devrions très prochainement savoir qu’un juge d’instruction, vraiment indépendant du pouvoir politique, devrait être nommé pour suppléer le procureur Courroye dans cette affaire, afin de s’occuper enfin, du blanchiment de fraude fiscale, car c’est bien de cela dont il s’agit aussi.
 
 
Crédit photo : 2010 Reuters

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