Xi Jinping, pourrait-il stopper les hostilités en Ukraine ?

par Patrice Bravo
vendredi 24 février 2023

D'après le discours de Wang Yi, membre du Bureau politique du Comité central du Parti communiste chinois (PCC), prononcé lors de la Conférence de Munich sur la sécurité, la Chine avancera son plan de paix pour l'Ukraine le 24 février. Il sera très probablement présenté par le président chinois Xi Jinping en personne, mais il pourrait également être publié en tant que document. Wang Yi a déjà consulté l'Allemagne, la France et l'Italie à ce sujet. 

Le plan en question prévoit que les principes de souveraineté et d'intégrité territoriale mais aussi les préoccupations légitimes de la Russie en matière de sécurité doivent être pris en compte. En rejetant toute concession au profit de Moscou, les politiques de l'UE apprécient le fait que la Chine s'implique dans le débat sur le dossier ukrainien. 

D'après le Guardian, la Chine fait partie des rares puissances à pouvoir influencer la Russie. À noter qu'elle avancera son plan au moment du premier anniversaire du début de l'opération militaire spéciale. Wang Yi a déjà mis au courant plusieurs chefs de diplomatie en Europe. Mais ils n'ont pas compris si les propositions de Pékin seraient détaillées ou seraient un simple appel à un règlement pacifique, comme c'était le cas auparavant. Les politiques européens sont particulièrement préoccupés par le fait que la Chine désigne l'Occident comme l'instigateur de la guerre. Et cela pourrait provoquer un écho dans le Sud global. 

La ministre allemande des Affaires étrangères Annalena Baerbock a salué l'initiative chinoise. "En tant que membre permanent du Conseil de sécurité des Nations unies, la Chine doit user de son influence pour assurer la paix globale", a-t-elle expliqué. La ministre a activement évoqué avec Wang Yi la signification de la notion d'une "paix juste". D'après Mme Baerbock, cela signifie qu'on ne récompense pas l'agresseur mais qu'on défend le droit international et celui qui a fait l'objet d'hostilités. Le même message a été envoyé à la Chine par les chefs des diplomaties française et italienne. 

Des notes contradictoires ont retenti dans le discours de la ministre allemande. D'un côté, il faut que la Russie retire ses troupes, de l'autre, il faut profiter de la moindre opportunité pour rétablir la paix. 

En se préparant au préalable à une réponse à l'initiative chinoise, l'Occident comprend que quand Pékin appellera au dialogue et à la paix, cela pourrait susciter une résonance dans les pays en développement. Ainsi, le ministre brésilien des Affaires étrangères Mauro Vieira a dit qu'en condamnant la Russie à l'ONU son pays prônait en même temps la création d'une atmosphère favorable aux négociations. Alors que la chef de la diplomatie namibienne Saara Kuugongelwa a déclaré : "Nous voulons régler le problème, et non trouver le coupable." 

Certains pays occidentaux songent à avancer une nouvelle résolution en soutien à l'Ukraine à l'Assemblée générale des Nations unies. L'an dernier, 141 pays ont soutenu Kiev, mais on ignore s'il y aura de nouveaux partisans de l'Ukraine dans le Sud global. Le chancelier allemand Olaf Scholz, qui s'est rendu au Brésil et en Afrique du Sud, pour y obtenir une plus forte condamnation de la Russie, est revenu pratiquement les mains vides. Il a déclaré à Munich : "Il ne suffit pas du tout de parler des valeurs communes pour qu'on vous croie à Jakarta, New Delhi, Pretoria, Santiago ou Singapour." 

Les propos de Wang Yi sur la position de la Chine n'ont rien de nouveau. La Chine plaidait toujours pour la paix. À noter que Wang Yi a parlé de l'importance de prendre en compte les craintes de toutes les parties. Sous-entendant que le règlement pacifique doit tenir compte des craintes aussi bien de la Russie que de l'Ukraine. Si la Russie estime que l'adhésion de l'Ukraine à l'Otan représente une menace pour sa sécurité, alors il faut le prendre en compte. 

Quand certains commentateurs disent que Xi Jinping pourrait stopper les hostilités, on se demande : comment ? Peut-être proposer un certain schéma de négociations en tenant compte des intérêts des parties. Autrement dit, un certain compromis. C'est une bonne proposition, mais pas très réaliste. L'Ukraine ne l'acceptera pas aujourd'hui. Kiev dit qu'il faut remporter la victoire. On a le sentiment que la Chine ne se sent pas très à l'aise, avant tout à cause de la pression de l'Occident. C'est pourquoi la Chine voudrait montrer qu'elle aspire à la paix. Et ce, au plus haut niveau. 

Les Chinois le disent davantage pour eux-mêmes que pour obtenir un résultat. Ils veulent parer les accusations qu'ils provoquent le conflit ou soutiennent l'un des camps. Cette initiative pourrait jouer un rôle à terme. Mais pour l'instant, les parties n'y ont pas prêtes. 

Le South China Morning Post écrit que Wang Yi terminera sa tournée à Moscou. C'est là qu'il expliquera visiblement l'initiative de Pékin. Munich a permis de rétablir les contacts entre les hauts responsables de la Chine et des États-Unis. Wang Yi et Antony Blinken se sont mutuellement exprimés les réclamations de leurs gouvernements.

Alexandre Lemoine

Les opinions exprimées par les analystes ne peuvent être considérées comme émanant des éditeurs du portail. Elles n'engagent que la responsabilité des auteurs

Abonnez-vous à notre chaîne Telegram : https://t.me/observateur_continental

 

Source : http://www.observateurcontinental.fr/?module=articles&action=view&id=4664


Lire l'article complet, et les commentaires