Zones de Non Traitement : souhaite-t-on la mort de l’Agriculture française ?

par Valentin Lagorio
vendredi 27 décembre 2019

Le 20 décembre, dans un communiqué du Ministère de l’Agriculture, les distances minimales pour les zones de non traitement (ZNT) ont été annoncées :

- cinq mètres pour les cultures dites basses comme les légumes et céréales,

- dix mètres pour les cultures hautes, fruitiers ou vignes,

- vingt mètres pour les produits « les plus dangereux ».

Ces annonces font suite au projet de loi, du mois de juillet dernier, portant sur des zones non traitées de 5 à 10 mètres sur des parcelles de terre juxtaposés aux habitations.

Il est quand-même fou de définir des zones de non traitement alors qu’un texte encadrant les chartes d’utilisation des produits phytosanitaires prévues par la loi Egalim était attendu pour cette fin d’année…

Par cette décision, le gouvernement entend apaiser les relations entre Agriculteurs, riverains et élus locaux…
Nous n’en croyons rien et ces annonces sont même dangereuses. Pourquoi ?

Tout d’abord, la conséquence immédiate sera que des milliers d’hectares seront donc inexploitables.
Ce qui veut dire que la surface agricole française, déjà fragilisée par l’accaparement et l’artificialisation des terres, va perdre davantage de surfaces.

Ensuite, comprenons bien qu'il va falloir quantifier toutes ces ZNT et la perte de revenus pour les agriculteurs face à cette nouvelle contrainte. Oui, contraintes économiques avec donc la perte de revenus et des charges supplémentaires, des contraintes environnementales.

Enfin, cette décision n’apaisera pas les relations entre habitants et Agriculteurs car qu’est-ce qui prouve que les premiers qui verront un pulvérisateur dans un champ ne crieront pas au loup ? Qu’est-ce qui leur montrerait tout de suite que le pulvérisateur soit équipé d’un produit à faible risque ou que l’engin soit doté d’une buse anti-dérive ?

Il existe un fort risque de conflit entre des riverains et Agriculteurs : si un habitant décède à cause d'une maladie liée aux produits phytosanitaires, ses enfants attaqueront l’Agriculteur mis en cause. Dans ce cas, comment prouver que l'épandage a toujours été effectué à dix mètres et non en-dessous ?
C’est une décision dangereuse, qui est donc inacceptable et inapplicable !

Pour tenter de contenter tout le monde, j’avais pensé personnellement à un espace libre de 10 mètres entre les habitations qui viennent se coller aux champs ( et non le contraire), mais cette idée est très dangereuse également.

Réfléchissons et constatons d'abord les réalités du terrain avant de prendre des décisions ubuesques !
Mais les technocrates des salons parisiens n’en ont à rien à faire des réalités du terrain.

Car la question n'est pas de savoir si il faut des ZNT mais si les pouvoirs publics sont prêts à mandater des chercheurs pour trouver des produits naturels de substitution aux pesticides, sans pour autant que cela n'augmente les coûts de production, car rappelons-le, les pesticides sont des moyens de compresser les coûts de production.

La logique en France, c’est interdire mais ne rien remplacer… une aubaine pour le monde agricole qui est à la fois déconsidéré et sous-rémunéré et à qui on ajoute des taxes et des charges.
Les pouvoirs publics appellent à consommer local, à encourager nos Agriculteurs à monter en gamme...mais réduisent la surface agricole française. Certains seront donc ravis de faire tourner la machine infernale qui consiste à mettre à mort notre Agriculture en important des produits alimentaires de médiocre qualité.

Rappelons aussi que les Agriculteurs français utilisent avec parcimonie les pesticides, contrairement à d’autres pays (notamment d’Amérique ou en Espagne) où les produits phytosanitaires sont pulvérisés à tout-va !

Ces mêmes pays qui nous envoient leurs denrées alimentaires alors que l’article 44 de la loi Egalim doit nous protéger car il interdit toute importation de denrées alimentaires qui ne respectent pas nos modes productions :

Article L236-1 A – LOI n°2018-938 du 30 octobre 2018 – Il est interdit de proposer à la vente ou de distribuer à titre gratuit en vue de la consommation humaine ou animale des denrées alimentaires ou produits agricoles pour lesquels il a été fait usage de produits phytopharmaceutiques ou vétérinaires ou d’aliments pour animaux non autorisés par la réglementation européenne ou ne respectant pas les exigences d’identification et de traçabilité imposées par cette même réglementation. L’autorité administrative prend toutes mesures de nature à faire respecter l’interdiction prévue au premier alinéa.

Les conditions de formations et l’utilisation des pesticides se sont renforcées. Que chacun se rappelle qu’au sortir de la seconde guerre mondiale, la production agricole a été augmentée pour pouvoir nourrir la population. Certains grands groupes ont émergé et ont commencé à réduire en esclavage le monde agricole en le rendant dépendant de certains produits.

Au lieu d'attaquer les Agriculteurs, attaquons les causes du problème, c'est-à-dire le système agro-productiviste industriel mondialisé dans lequel ils sont menottés.
Mais pour cela, il faut changer urgemment de concepts politiques, économiques et sociaux.

Valentin Lagorio, secrétaire-général-adjoint à l'Union du Peuple Français.


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