Emploi ou dette ?

par Alain Lambert
mercredi 11 janvier 2006

Interview ce matin, tôt, sur Radio Classique, et demain sur BFM. Puis conférence nationale du Premier ministre sur les Finances Publiques. L’enchaînement de ces rencontres et la lecture de la presse me donnent le sentiment qu’il subsiste encore en France, et c’est sans doute le seul endroit au monde, une conviction que la dépense est le meilleur soutien à l’emploi. Je ne m’explique pas qu’on puisse encore croire à cette légende. Si elle était vraie, attendu notre niveau très élevé de dépense, nous serions au plein emploi, voire en surchauffe de notre économie. En réalité, la dette : c’est ce qui étouffe la croissance et l’emploi, et non l’inverse.

Voilà quinze ans que je m’époumone à crier cette conviction sans convaincre beaucoup, j’en conviens. Nous sommes en déficit budgétaire depuis 30 ans, non pas parce que nous ne prélevons pas assez, mais parce que nous dépensons trop ! Notre dette n’a pas encore atteint son zénith, mais certains ne désespèrent de l’y hisser. Notre chômage est désespérément élevé. Que croyez-vous qu’on en conclue ? Qu’il faut continuer ! On se pince pour y croire, et pourtant ... J’entends que la question des jours actuels serait de savoir quand nous briserons la spirale de la dette. Cette année ? L’année prochaine ? Avant, après les élections ? Je réponds : maintenant ! Il faut commencer maintenant. Le plus tôt sera le mieux. Pour le pays, pour le gouvernement, pour la croissance, et pour l’emploi.



Ce sont d’ailleurs les recommandations de la Commission présidée par Michel Pébereau à laquelle j’ai eu l’honneur d’appartenir. Nous devons absolument nous convaincre, et convaincre les plus hautes autorités de notre pays, que la maîtrise de la dette est une priorité absolument du même ordre que le soutien à la croissance, à l’emploi, à la solidarité. Que ces objectifs sont totalement liés. Qu’ils sont indissociables. Et que la fuite en avant dans l’endettement ferait courir les plus grands risques précisément à notre économie, à la croissance, et à l’emploi, et donc à la cohésion sociale.

Le budget de l’Etat doit être remis à l’équilibre en moins de 5 ans (4 ans est notre recommandation). Cela suppose que les dépenses soient désormais stabilisées en euros courants (zéro valeur), et non plus seulement en euros constants (zéro volume), comme actuellement. En restant en euros constants, l’augmentation du ratio d’endettement n’est stoppée qu’au bout de 4 ans. Il faut alors attendre 8 ans pour revenir à l’équilibre, et 9 ans rien que pour revenir à notre niveau d’endettement actuel ! Non, décidément, il ne serait pas raisonnable d’attendre 9 ans pour retrouver les marges de manoeuvre dont nous avons besoin pour renforcer notre potentiel de croissance et de solidarité. En revanche, en euros courants, l’accroissement de l’endettement est stoppé en 2 ans. Voilà pourquoi il faut stabiliser les dépenses en euros courants dès maintenant. Attendre 2007, c’est perdre un an, c’est prendre le risque de donner l’image d’une législature résignée, et ce n’est pas placer la prochaine dans une dynamique positive.

Non décidément, l’emploi n’a pas de pire ennemi que des finances dégradées et une dette excessive. Qu’on se le dise !


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