Résurrection de la Grande barrière de corail

par hommelibre
mercredi 3 avril 2024

On les disait morts, plus blancs que les cheveux des anciens. Le nouvel épisode de blanchissement des coraux annoncé par les autorités australiennes va-t-il les achever ?

Prairies coralliennes

Dans cet article daté du 8 mars on apprend que :

« Cet épisode de blanchissement massif, le septième depuis 1998, a été confirmé par les scientifiques travaillant pour le gouvernement à la suite de relevés aériens effectués sur 300 récifs peu profonds. »

Selon la vérité scientifique qui prévalait il y a une dizaine d’années ils devraient être morts. Ce n’est pas le cas (image 1 Wikiwand). Pourtant :

« D’après le responsable des océans pour WWF Australie, Richard Leck, de très nombreux coraux risquent de mourir si les températures océaniques ne baissent pas rapidement, dans les semaines à venir. »

Il y a huit années ce blanchissement était présenté comme mortel. En effet en 2016 la RTS annonçait :

« Au moins 35% des coraux du nord et du centre de la Grande barrière australienne sont morts ou sont en train de mourir sous l'effet d'un épisode de blanchissement massif. »

En 2012, selon une autre annonce dramatique :

« La Grande barrière de corail en Australie a perdu plus de la moitié de ses prairies coralliennes au cours des 27 dernières années sous l’effet des tempêtes, de la prédation d’étoiles de mer et du blanchiment lié au réchauffement climatique, a révélé mardi une étude australienne. »

 

 

Bleaching and death ?

Le seul scénario proposé est donc la mort des coraux et de la biodiversité qui les accompagne.

Mais aujourd’hui on sait que ce n’est pas le cas. Ces informations alarmistes ne sont qu’une partie la réalité. Les coraux peuvent se remettre d’épisodes de fort stress thermique.

D’autres théories voient alors le jour pour combler les trous de la précédente, comme : le risque que la répétition des blanchissements soit à terme mortelle.

 

Autre son de cloche pourtant : une agence gouvernementale, l’AIMS (Institut australien des sciences marines) relève une nette résilience des coraux. Dans son récent rapport de 2022 on peut lire :

« La récupération continue des coraux conduit à des sommets de 36 ans sur les deux tiers de la Grande Barrière de Corail. »

Celle-ci s’est donc agrandie. Si l’année 2016 a vu en effet la mort de nombre de coraux, cette mort est loin d’être définitive. Plus précisément :

« Depuis, le récif a rebondi. Les conditions de La Niña généralement plus fraîches signifient que les coraux durs ont récupéré un sol important, repoussant de niveaux très bas après une décennie de perturbations cumulatives… »

Et encore :

« Le récif a montré une capacité impressionnante à se remettre de perturbations généralisées, quand il a une chance – it’s not all just bleaching and death. »

 

 

Rester lucide

Ce n’est pas simplement le blanchiment et la mort. Les choses sont plus complexes. Cette crainte s’est cependant répandue, expression d’une pensée binaire OU/OU à la manière de Greta Thunberg. Elle se trouve bien dans cet environnement mental exclusif et binaire.

Il est normal d’explorer le risque potentiel de la mort définitive des coraux mais il n’est pas normal (scientifiquement parlant) de ne pas envisager d’autres scénarios. Pourtant il en existe. La repousse spontanée, la sélection naturelle qui profitera aux espèces les plus robustes et adaptatives, la variation de la biodiversité locale qui peut être un enrichissement autant qu’une perte, en font partie.

L’écologie non idéologique est conservatrice, elle protège et renforce, je suis d’accord, mais elle ne devrait pas chercher à figer le vivant une fois pour toutes.

Et si même la Grande barrière devait disparaître, il est très possible qu’elle soit ensuite remplacée par autre chose de tout aussi important pour l’écosystème.

Je note par ailleurs que cet office australien ne fait pas dans l’euphorie et reste lucide :

« Encore une fois, l’histoire est plus compliquée que les titres. Certains récifs se sont fortement rétablis, d’autres très peu. »

 

 

Pas figées

Et enfin :

« Cette année, le rebond rapide des coraux s’est arrêté. Certains récifs ont continué à récupérer, mais ceux-ci ont été compensés par d’autres qui ont perdu des coraux. La perte de coraux est due aux effets du blanchissement de 2022 dans les régions du nord et du centre, à la prédation des étoiles de mer à couronne d’épines (Acanthaster planci) dans les régions du nord et du sud, aux dommages causés par le cyclone tropical Tiffany dans le nord et à la maladie des coraux dans certaines régions du sud. »

On le voit, les choses bougent naturellement. Le pire ennemi des coraux d’Australie est l’étoile de mer, dont les jeunes populations apprécient les eaux chaudes.

La réalité est plus complexe que les annonces catastrophistes ne le laissent entrevoir. On ne sait pas ce que sera l’avenir, ni s’il sera propice ou difficile à la vie. Mais ces constats de résilience montrent que les choses ne sont pas figées, elles bougent, et que les croyances irréductibles d’un jour ne sont plus que des hypothèses parmi d’autres le lendemain.

 

 

Augmenter la résilience

À noter enfin une importante étude sur la résistance des algues hôtes des récifs à une chaleur accrue, ce qui a pour effet de réduire le blanchissement :

« Les épisodes de stress thermique océanique restent des phénomènes bien distincts, ouvrant donc la possibilité d’utiliser ce type de souches résistantes dans la restauration corallienne, afin d’augmenter la résilience des coraux face aux changements climatiques. Cependant, de nombreuses études sont encore à mener, notamment sur la stabilité temporelle des algues à haute résistance thermique, avant de pouvoir introduire ces algues dans les protocoles de restauration. »

Pour le moins la Grande barrière de corail n’a pas rendu l’âme.

 


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