Pie 3,14

Avant de commenter cet article faux de A à Z il est utile de jeter un coup d’œil aux liens fournis par l’auteur.

Cet article est la traduction française venant du site Zerohedge, un blog financier américain catalogué pro russe et complotiste. Il est censé reprendre un article de Remix news, un média hongrois dont le but est de mettre en valeur le point de vue du groupe de Višegrad (Hongrie, Pologne, Slovaquie).

Or l’article de Remix News résume une interview du chef d’état major polonais à la chaine de télévision MSNBC en février 2023 en joignant la vidéo de l’émission. 

Zerohedge reprend les images du militaire à la télé le 29 avril et invente un discours qu’il n’a jamais tenu en prétendant retranscrire une réunion du bureau de sécurité nationale comme s’il était évident que ces réunions fassent l’objet de commentaires publics !

On résume : on prend un militaire qui vient parler de la place de la Pologne dans l’OTAN à la télé. Deux mois plus tard on lui invente un discours pessimiste sur l’Ukraine soit disant tenu lors d’une réunion stratégique en illustrant l’article avec sa tête dans le décor de l’émission.

On est vraiment dans le degré zéro de la propagande. 

Vos articles sont bien hasardeux. Celui de sciences po date de 2012, celui sur les pauvres en France rejetés à la périphérie n’apporte rien sur les dynamiques russes qui n’ont rien à voir avec cela, l’Express parle d’une Vladivostok qui profite de la croissance asiatique ce que personne ne conteste, le dernier lien peu officiel est baroque.

Je sais comme vous que les années 90 ont été terribles pour les russes. 

Je n’ai pas l’impression de négliger ni les forces de ce pays ni ses faiblesses.

La Russie est une puissance militaire et nucléaire affectée d’une économie rentière peu efficace dont la population ne profite pas pleinement en raison d’une organisation kleptomane de son économie organisée jusqu’au sommet de l’Etat.

Voilà mon sentiment. 

Ces événements...qui les a fait surgir ? demande l’auteur.

A mon humble avis la réponse est interne à la Russie. 

Il y a un pouvoir qui devient de plus en plus personnel et de moins en moins démocratique à partir de 2011. D’abord vu comme un sauveur après les terribles années 90, Poutine fait tout pour s’accrocher au pouvoir (modification de la constitution, parlementarisme dévoyé, répression et élimination des opposants) et réussit à diriger le pays pendant un quart de siècle. On sait ce que cela donne, les exemples sont nombreux : raidissement, isolement, paranoïa, dogmatisme.

Il y a une histoire russe faite d’impérialisme régional depuis des siècles, un pays qui se vit en empire, colonise, annexe, déporte, russifie sous le tsarisme comme pendant l’URSS. 

Il y a une société qui n’a connu le fait démocratique que pendant 15 années véritablement. Chaque citoyen sait qu’il faut pour être tranquille s’éloigner du fait politique, se débrouiller en silence dans son coin, afficher la plus grande neutralité. L’idée de société civile n’existe pas vraiment. Une société aphone mais qui profite d’une ouverture sans précédent de « l’opulence à l’occidentale » pendant 30 ans dans une économie de rente comme celle de l’Arabie.

Il y a un leader devenu tout puissant formé au temps de l’URSS qui puise sa pensée politique aux sources nationalistes et impériales du XIXème. Il base la propagande étatique sur « la grande guerre » contre les nazis et réactive le fantasme impérial qui flatte le sentiment national d’une population humiliée par l’effondrement post URSS.

Le résultat est un potentat devenu dictateur, obsédé par l’idée d’encerclement (les historiens ont montré que plus la Russie s’étend plus elle se sent encerclée) qui réactive de vieux schémas de la guerre froide sans avoir compris que l’Ukraine suit un autre chemin.

La réalité est un conflit sanglant inutile qui enfonce la Russie dans ses pires travers et marquera, je le pense un isolement pour de longues années.

@titi
Je peux vous en parler parce qu’un membre de ma famille y vit et y travaille. Son opération chirurgicale ainsi que les séances de rééducation ne lui ont pas coûté un seul franc (suisse).
En revanche son assurance ne lui rembourse rien en dessous de 2500 francs soit 2500 euros. Ce qui signifie qu’une visite chez le médecin, le dentiste, un spécialiste, des analyses, des médicaments à acheter lui coûtent 4 à 5 fois plus cher au minimum qu’en France. Voilà pourquoi cette personne profite de ses séjours en France pour se soigner au quotidien car même en payant sans être remboursée elle fait tout de même d’importantes économies.
Elle gagne plus du double de ce qu’elle aurait en France pour le même métier mais l’accès à la propriété lui est interdit tant les prix sont délirants, le coût de la vie est élevé, le temps de travail est plus long (moins de congés, semaine de 42.5 heures) en revanche le niveau des services (transports, services publics, aménagements urbains, qualité de l’environnement) est très bon.
A titre personnel je préfère vivre en France, je connais aussi un peu la situation au RU et je préfère aussi la France. Mais tout est relatif. Cette personne me racontait qu’elle travaillait avec une asiatique dont la carrière s’était déroulée en Chine, aux USA et maintenant en Suisse. Cette dernière lui assurait qu’elle n’avait jamais connu de si bonnes conditions de travail qu’en Suisse et que les européens ne connaissaient pas leur chance de vivre dans un environnement de travail si peu écrasant et peu stressant...

@pemile
Tout à fait sauf qu’il néglige de fait l’incroyable inégalité de la répartition des richesses dans ce pays qui réussit l’exploit d’être plus inégalitaire que les USA.
Il néglige la vétusté des hôpitaux et du système de santé ainsi que la corruption à toutes les échelles de la société. Il néglige l’état dégradé de la plupart des infrastructures publiques et des réseaux de communication.
Il y a en Russie deux pôles de prospérité, Moscou et Saint Pétersbourg, une classe moyenne réduite qui y vit plutôt bien ainsi que des ultra riches. Le reste du pays s’en sort difficilement avec un niveau de vie très bas comparé à l’Europe.
Ce n’est pas un jugement de ma part ni une vision misérabiliste, c’est un fait évoqué par de nombreuses études économiques et sociales ainsi que par les médias russes non inféodés au pouvoir, aujourd’hui en exil et par les correspondants étrangers dont certains passent une bonne partie de leur vie en Russie comme Benoît Vitkine.