@Emin
Bernar Paşa
Il y a dix ans, j’aurais peut-être pensé comme
vous, mais on est arrivé à une situation où l’immigration commence
à poser effectivement de sérieux problèmes. Non pas la présence
en France de gens qui seraient venus d’ailleurs : la France a
toujours été, et c’est très bien, une sorte de melting pot, mais
l’Islam est devenu singulièrement dangereux puisqu’il est
le premier obstacle, désormais, à une intégration réussie. Depuis quelques
années, c’est même à une dés-intégration qu’on est en train d’assister
: les musulmans convaincus deviennent de plus en plus visibles,
multiplient, par une espèce de provocation, toute sorte de signes
qui disent un refus d’adhérer au consensus républicain. Quand on
est à gauche, c’est embarrassant de
parler de la question parce qu’il y a la xénophobie du FN qui a fini
par générer une espèce de tabou : tout bien-pensant doit donc
affecter de ne s’être aperçu de rien : circulez, il n’y a rien à voir ! Or, il
est maintenant très clair qu’il existe deux xénophobies : celle du
FN et celle, aussi, des populations réislamisées à la sauce
salafiste pour qui les « Céfrans », comme ont dit dans les
banlieues, sont devenus l’ennemi . Les deux xénophobies sont tout
aussi détestables ; il faudrait être complètement masochiste pour
accepter que la tolérance soit toujours univoque et accepter de
subir cela comme une manière de punition légitime résultant du
passé colonialiste de la France.
Dimanche prochain, il y aura à
Paris une manifestation des français musulmans hostiles à
l’islamisme. J’espère qu’ils seront nombreux mais je crains tout de
même de ne pas pouvoir être aussi optimiste qu’il le faudrait. Au
congrès de l’UOIF, dimanche passé, les 40000 participants (les
hommes d’un côté, les femmes de l’autre !) ont été prêchés par
le frère Ramadan qui les a remis dans la bonne voie de l’orthodoxie
islamique made in Arabie Saoudite. C’est-à-dire que l’espèce
d’aggiornamento qui serait absolument vital pour l’Islam français
n’aura probablement pas lieu. Les religions modernes sont devenues
vaguement déistes : les chrétiens se font désormais une sorte de
cocktail spiritualiste en mélangeant toutes les croyances qui
passent à leur portée. C’était un peu le cas aussi pour les
musulmans il y a vingt ans : du jeûne du Ramadan on n’entendait
jamais parler et rien ne distinguait une immigrée d’une
européenne, dans la rue - et encore moins dans les piscines !
A côté de cela, les crétins
utiles de la plupart des partis « de gauche », au nom
d’un relativisme imbécile, encouragent le fanatisme autant qu’ils le
peuvent : que des femmes se fassent lapider à quelques milliers de kilomètres, qu’on les oblige à se
voiler sous la menace des coups, peu leur chaut pourvu que cela ne se
passe pas devant leur porte : toutes les coutumes sont légitimes et se valent bien, n’est-ce pas ?
Sur une autre page d’Agoravox, une intellectuelle tunisienne décrit
la situation abominable dans laquelle son pays est en train de
sombrer. Il se trouve des lecteurs sans doute supérieurement intelligents pour lui représenter que c’est ce
que les Tunisiens ont démocratiquement voulu, qu’Ennahda est
probablement un mal nécessaire, que c’était pire sous Ben Ali ou
Bourguiba, etc. C’est accablant.
Finkielkraut ne dit pas autre
chose que ce que je viens de vous répondre. Ca bousille un peu les
illusions de la bonne conscience qu’on aimerait avoir, mais penser le
réel, c’est quand même d’abord le voir tel qu’il est sans se
raconter les histoires lénitives qui servent à endormir les petits enfants.
Je tiens à vous préciser, puisqu’on est constamment ramené ici à la campagne présidentielle, que je ne voterai pas pour la droite, mais pas non plus pour une gauche désormais introuvable. Mieux vaut rester chez soi que d’aller assurer la carrière politique d’un crétin.