Le mystérieux Verrou :
Fragonard l’exécuta pour le marquis de Véri, qui souhaitait un pendant à « L’Adoration des bergers ». Ainsi s’opposent amour profane et amour sacré. Certains détails intriguent. En effet, si l’homme verrouille la porte, pourquoi la chambre est-elle déjà dans un désordre (lit désordonné, vase renversé, laissant présager un tumulte de jeunes tourtereaux) ? Quel que soit le sens qu’on lui prête, le tableau est en rupture avec la production antérieure de Fragonard. Il le peint après 1774 et un second séjour en Italie qui revivifie son inspiration. Inhabituel chez Fragonard, le dessin n’est pas crédible, le bras de l’homme est trop long, et le cou inexistant. La lumière est posée sur le couple, comme un projecteur, alors que des
tentures de baldaquin situé hors champ accentuent encore l’impression
d’une scène théâtrale ; les étoffes constituent en effet plus de la
moitié de la surface peinte totale.
Le verrouillage reste un mystère. C’est comme si en fermant le verrou de la porte, le peintre fermait du même geste ce secret d’alcôve.